Paris en août
(Esplanade du Champs de Mars, juillet 07)
Forte concentration humaine localisée, transhumance de vélib's, petits vieux qui peuvent, enfin, accaparer l'unique caissière de l'unique superette du quartier restée ouverte, et vagues de touristes béas devant une ville devenue, comme par magie, si tranquille et si clean (car les mendiants subissent également une transhumance de saison, et les tentes trop voyantes du quartier St Martin ont du aller faire du camping ailleurs afin de ne pas polluer la vue, sévèrement gardée, des nouvelles vedettes du canal). Et que dire des joies de la plage, digne de la Croisette en haute saison ? ... mais où ai-je garé mon char à voile ?
(Vélib en déplacement sans vélibeux, juillet 07)
C'est encore loin Itaque ?
(Route côtière, Manche, juillet 07)
Le voyage tient plus de la nostalgie que de l'euphorie, car le retour compte tout autant que la découverte. Comme Ulysse qui n'en finissait pas de revenir et, tout en vivant l'aventure, ne pensait qu'à son île, le fait de partir contient déjà le plaisir du retour. Aujourd'hui on voyage pour se distraire, pour affaire ou pour aller vérifier "si ce qu'on a rêvé est bien là où on l'a rêvé" (Deleuze). Le seul vrai voyage serait donc l'errance, sans but et sans date, à la Kérouac. Ce n'est pas tout à fait ce que je vais faire maintenant mais j'aurai l'emphase des grandes perspectives et des nouveaux paysages. Chouette alors ! (J'ai été longtemps absente pour cause d'exposition. Oui, merci c'était super, non pas trop de monde la saison (touristique) n'était pas commencée (à cause du temps), oui j'ai vendu et j'ai eu des contacts. Mettre les articles de presse ici ? Ça non, ma bobine sur vos écrans ce sera pour une autre fois :=)
La bête universelle
(Soirée théâtre à Tréauville, Manche, mars 07)
Une chimère est un monstre, à tête de lion, corps de chèvre et queue de serpent, qui crachait le feu et dévorait les humains. Belle image pour nos rêves obsédants qui nous font prendre les miroirs pour des vérités et les ombres pour la réalité. Courir après la chimère on aime ça, sans doute parce qu'il faut mieux avancer que stagner dans les eaux croupies du ressassement. Parce que ne plus courir c'est comme déjà mourir, alors vive les quêtes folles, les paris impossibles et les coups de tête farfelus. Nos chimères sont des soleils de minuit qui font tourner le monde. Soyons-leur reconnaissants et ne les tuons pas trop tôt.
A vivre et à voir
("Monumenta" d'Anselm Kiefer au Grand Palais, juin 07)
Ça parle de la terre, de la mer et du ciel. De destruction, de naufrage et de résurrection. De l'Homme, des livres et des fougères. L'immense vision d'Anselm Kiefer est visible au Grand Palais jusqu'au 8 juillet. Son nom : Monumenta 2007. Il faut vraiment être possédé par une vision particulière pour investir seul, et si pleinement, cet espace lumineusement vide. Une vision qui joue sur les contrastes. Dès l'entrée, on se trouve face à des "maisons", massives sous la structure aérienne de la verrière. Intérieur/extérieur et s'enchaînent les oppositions. Brut par l'emploi de la terre, du béton et de la démolition, fragile par le verre et l'équilibre instable des ruines. Lourd parce que les blocs, et aérien parce que les étoiles, son thème cher. Le tout bancale, sur le fil du verre qui va tomber, et le tout solide, bien ancré dans le temps et une réflexion qui va puiser dans la terre même. A l'image de sa peinture, qui se fabrique lentement, par sédimentation, mais qui s'écaille et tombe par morceau sur les bords par l'usure de son poids. Une expression qui s'impose sans en imposer, un regard qui vient de loin et dure longtemps longtemps. On pense "C'est du grand Art", je pense à celui qui a pu porter ça et je me dis "Quel grand Monsieur".
Presque normal
(St-Vaast, bateau pour Tatihou, Cotentin, mai 07)
Maman les p'tits bateaux qui vont sur l'eau ont-ils des jambes ? Mais non mon gros bêta ! Des roues ! Sinon comment feraient-ils à marée basse ? Du moins c'est le cas à St-Vaast. Pour aller sur l'île de Tatihou, les roues servent à faire les derniers mètres selon les niveaux de la marée. Et ce jour de grande marée, pendant que les touristes, encombrés de valises, faisaient cette traversée sans eau en bateau à roulettes, en contournant longuement les huîtrières, on allait à pied vers l'île. En pêchant des moules.
(Ile de Tatihou, Cotentin, mai 07)
Le grain, l'eau et la poussière
(Plage du Val de Saire, Cotentin, été 04)
Le temps est, paraît-il, notre pire ennemi (et plus particulièrement celui de la femme dixit les magazines qui ne voient pas plus loin que le creux de la ride). Je ne l'oublie jamais, au point de pouvoir vivre sans montre en sachant toujours l'heure exacte, au point de ne pas savoir être poliment en retard, au point d'avoir souvent l'impression de tenir ma vie en tête d'un bout à l'autre. Je ne laisse rien filer et l'accumulation du tout, vécu et pensé, entrave parfois la marche légère des jours. Mais à force de passer le temps est aussi devenu un allié, car je réalise maintenant que je compte sur lui et avec lui. Passer à autre chose, continuer sur sa lancée, espèrer, projeter. C'est l'ami implacable avec qui tout passe, le meilleur comme le pire, mais avec qui tout revient, à l'image du ressac, qui efface et refait la même trace. Du moins presque la même... et cette différence est sans doute la chose la plus rassurante et la plus terrifiante qui soit, car un jour elle finit par s'appeller absence.
La vie rêvée du président
("Teletubbies et Bisounours, notre futur")
Ce matin j'ai accepté un "gratuit". Ces journaux ont un côté news du net, petits encarts vite écrits vite lus sans développement conséquent, qui ont juste le mérite de remplir le temps d'un trajet en métro. Mais celui-là valait son pesant de cahouètes ! Et je me devais de partager mon bonheur à tous ceux qui n'ont pas eu la chance de lire cette édition spéciale de l'Economie matin. Ce numéro exceptionnel parle, ni plus ni moins, du bilan fiction 2007-2012 de notre cher-nouveau-président. Je raconte. Une quarantaine de petits articles imaginent ce que sera notre futur proche. Tous les domaines sont abordés : l'Europe, l'e-commerce, la bourse, la société, les voyages sur la lune, le salaire du président (dérisoire), la gauche qui se cherche. La version net fait plus sérieuse, sur le papier ça parait léger et sucré comme un programme pour enfants (par contre rien sur le social ? Ils ont dû oublier ;=) Et donc tout va se passer merveilleusement bien ! (Pour nous le peuple, pas forcement pour le président. Subtil subtil !). C'est réellement "le retour de la France qui gagne". Bon, quand même quelques petis bémols parci parlà parce que, sinon, on pourrait ne pas y croire. Par exemple nous ne serons pas tous propriétaires. Ben non quand même ! Juste 62 % des français. Et les étudiantes mères de famille rateront toujours leur ascension social (il y avait un message dans cet article ?). Et puis il y aura bien quelques manifs de mentionnées et l'obésité restera un fléau. Mais quand même !!! Nous serons servi par des robots à la K.Dick et des réfrigérateurs intelligents, la Défense va devenir bio, Georges Cloney jouera James Bond et les chômeurs rapporteront de l'argent aux actionnaires ! Que ça va être chouette le futur !!! Mais une fois redescendu du nuage on se demande à quoi sert ce papelard. Bourrage de crâne, méthode Coué, plaisanterie d'un nouveau genre ? Ou alors les Français sont-ils devenus, en une semaine, de grands enfants qu'il faut bercer d'illusions et protéger de la réalité ? Rien n'est commencé et on nous fait déjà miroiter un bilan du style "plein les yeux" ? Pourquoi je pense à "1984" tout à coup ? En tout cas, ne me demandez pas ce journal : je le garde. La presse, même économique, ça devient vraiment rigolo ;=)))
Gros temps
Vous êtes prêts ?
Alors, vous êtes prêts à retrousser vos manches ? A suivre ce grand élan démocratique ? A y croire, à y travailler ? Ce soir je pense à ma mère, femme de ménage, qui remplit sa journée d'employeurs pour un salaire minimum. Elle le supporte malgré tout son métier pénible payé au plus bas, mais elle ne cherche pas à gagner plus. Elle les caserait où les heures de ce travail qui use bien avant l'âge ? La nuit ? Surtout que lorsqu'elle rentre, le soir, à 19h45, ce qu'elle souhaite avant tout c'est travailler moins pour être sûre, un jour encore lointain, de pouvoir profiter de sa retraite sur ses deux jambes. Et le programme, maintenant, pour améliorer sa qualité de vie, c'est quoi déjà ? Se lever encore plus tôt et travailler encore plus ? De toute façon, les heures sup ça ne marchent pas dans sa branche. C'est juste des journées sans fin payées au même tarif de misère. Allez, je tente mon pronostic : demain, le soleil ne va pas briller pour tout le monde pareil.